Le groupe scolaire existant La Jougnena situé à la Ferrière-sous-Jougne accueille actuellement 10 classes maternelles et élémentaires, ainsi que des services périscolaires. Le projet vise à anticiper l’augmentation des effectifs de l’établissement (+ 5 classes) et la fréquentation grandissante des services périscolaires (restauration + accueil). Mais, il ne s’agit pas seulement d’étendre un premier bâtiment réalisé il y a une décennie. Pour Archidium, l’extension est le témoin bâti d’une culture locale, de savoir-faire, d’un tissu industriel en activité et des ressources disponibles à un moment donné.
La commune de Jougne est située non loin de la frontière avec la Suisse, postée sur la ligne de crête du massif Jurassien à 1000m d’altitude. De cette situation géographique singulière, nous avons soutenu l’idée que le bâtiment crée joue un rôle autant dans le paysage lointain que celui de proximité. Notre proposition dialogue ainsi à différentes échelles avec les contextes bâti, social, naturel et géographique. L’architecture s’inscrit dans le présent, elle est un pont entre le passé et l’avenir, garante du passage de témoin d’une génération à une autre ; l’école est valorisée comme le lieu d’une transmission des cultures, savoirs et progrès.
Le projet repose sur quelques grands principes : le lien au paysage, l’habitabilité, la valorisation des ressources et savoir-faire locaux, l’approche bio-climatique, le respect attentif du site.
L’extension adopte une écriture architecturale qui lui est propre, dialoguant avec l’existant et le paysage. La façade suit la pente en bandeaux glissants, donnant une dynamique horizontale au bâtiment, comme des strates géologiques successives. S’insérant dans la pente, la construction en bois local est liée au sol par un socle béton.
En plan, une trame de 2 mètres rend la structure lisible et la construction rationnelle.
Deux volumes émergents disposent d’une couverture métallique qui accueille des panneaux photovoltaïques, tandis que le reste est végétalisé en continuité de l’existant.
Le projet recrée une entité cohérente par contraste, témoignant de l’évolution des usages, tout en valorisant les ressources et savoir-faire locaux. Les façades utilisent des matériaux naturels bio-sourcés et durables et les volumes sont compacts pour tendre vers une conception passive. La façade en tavaillons, matériau typique du massif jurassien, et la toiture métallique inspirée des fermes du Haut-Doubs, composent ainsi une architecture contemporaine, vernaculaire et frugale.
L’implantation de l’extension libère les vues vers la colline boisée. Le préau s’oriente vers le plateau sportif et les falaises du Mont d’Or, laissant à la cour élémentaire son caractère de « balcon ».
De nouvelles « cours fraicheur » végétalisées augmentent les usages pour les récréations et permettent des approches pédagogiques spécifiques avec un gradin pour faire classe dehors, des bacs potagers, etc.
Un parking arboré et ombragé ainsi qu’une plaine sportive accompagnent l’équipement créant une transition douce des espaces publics accessibles à tous vers l’école. C’est une manière de rendre attentif sur les bienfaits du paysage de proximité, même dans une commune rurale entourée de nature.
Les circulations sont pensées dans la continuité de celles existantes pour maintenir les entrées et accès. Néanmoins, la forte augmentation de la capacité d’accueil impose une mise aux normes de l’existant : le projet s’y adapte en proposant une colonne vertébrale qui relie les entités pour faciliter les flux au quotidien. Généreusement vitrée, elle agit comme un sas thermique au Nord-Est et permet de relier aisément les différents niveaux du projet. A son issue, la nouvelle salle polyvalente est desservie tout en s’ouvrant vers un parvis de l’espace public, permettant de rendre autonome et flexible cette salle, accessible autant aux habitants et associations qu’à l’école.
Le lien au paysage et à l’environnement est un enjeu de confort et d’habitabilité. Des espaces traversants, des entre-deux abrités, des apports généreux de lumière naturelle par haut-jour et façade et des cadrages sur le paysage, permettent un confort lumineux autant que thermique. Les classes tournées vers le Nord-Est reçoivent une lumière douce, comme dans un atelier d’artiste, propice à l’apprentissage sans éblouissement. Le tableau de l’artiste devient celui de l’enseignant …
Les matériaux sont choisis pour une atmosphère chaleureuse. Les intérieurs sont en bois brut : ossatures et structures en épicéa massif local et scolyté, planchers et cloisons porteuses en CLT apparent, fermettes en toiture, traitement acoustique et mobilier menuisés, … Le projet comptabilise ainsi 440 m3 de bois d’œuvre assurant une valorisation de cette ressource locale. Ces solutions robustes facilitent l’entretien (ponçage, réparation) et acceptent le vieillissement naturel du bois.
La façade bois en tavaillons affirme quant à elle le caractère local et transmet un savoir-faire en voie de disparition bien que hautement performant. L’architecture s’engage ainsi comme vecteur culturel.
L’adaptation à la pente est assurée par un socle minéral en béton, isolé et pouvant jouer le rôle de paroi de soutènement selon les cas. Le béton contraste avec le bois et renforce l’inertie globale du bâtiment habillant tous les sols sauf celui de la salle polyvalente où un revêtement sportif coloré prend place. Résistant et facile à entretenir, il contribue ainsi au confort thermique des lieux.
L’installation de géothermie existante se voit augmentée pour les besoins de chauffage et le projet favorise une température intérieure confortable sans climatisation, grâce à l’inertie du béton et à la ventilation naturelle permise par les baies judicieusement situées. Les débords de toit, les préaux, une bonne orientation et les masques naturels assurent une protection solaire passive adaptée aux différentes saisons.
Le préau est conçu comme une halle avec une charpente bois mise en valeur et dimensionnée pour accueillir une surélévation future de 6 classes supplémentaires sans aucune modification de la structure.
Enfin, un phasage de chantier permet la construction en site occupé, prenant en compte les nuisances et la sécurisation du site.
Croisant les enjeux d’économie locale, d’écologie et de savoir-faire, le projet établit un dialogue assumé avec l’école existante et le grand paysage pour s’intégrer dans son site. Tout en implantant les symboles d’une culture locale, l’architecture favorise les flux et usages, la lumière naturelle et les vues, la compacité et une rationalité constructive ainsi que des matériaux bio-sourcés, garants de durabilité.